Faire naufrage, sombrer, pour les marins, ce sont des fortunes de mer...
Le récit ci-dessous a inspiré cette musique...
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Extrait du rapport de mer
Établi à la suite de la perte en mer du voilier "Carlos III" le 11 décembre 1982
10 décembre 1982 ; 12h05, Le Carlos III passe les jetées du Grau-du-Roi, vent nul, route au moteur, un peu de houle fait rouler le bateau et claquer les drisses le long du mât. Sans raison particulière, l’équipage (moi-même et ma compagne Camille) est nerveux… 16h, le vent s’est levé d’O-N-O et s’est établi à 6 Beaufort, l’équipage pourtant expérimenté est maintenant tout-à-fait anxieux… 20h, le vent est environ de 8 Beaufort, et nous faisons route au portant sous foc seul. 23h15, le point d’amure du foc commence à se déchirer, sans ragage ni effort démesuré et j’envoie le petit foc. Il devient difficile de barrer convenablement.
Le 11 décembre 1982 ; 02h15, maintenant, la mer déferle violemment et balaie le pont régulièrement. Je suis plusieurs fois projeté loin de la barre et je suis obligé de m’amarrer. Camille tente de se reposer. Vers 03h, elle me signale une voie d’eau et met la pompe d’assèchement en marche, mais elle n’arrive pas à localiser l’origine de la voie d’eau... Le vent est maintenant de force 11 Beaufort, la mer croisée est très dure.
03h35, le petit foc se déchire, nous continuons en fuite sous tourmentin, le voilier réagit mal dans les creux et part en survitesse sur les crêtes.
Barrer devient physiquement très pénible. Les déferlantes balaient sans cesse le pont. 03h55, la pompe d’assèchement tombe en panne, il faut évacuer l’eau au seau, l’équipage s’épuisera vite à cette tâche... 04h05, la drisse de tourmentin casse, nous continuons à sec de toile. 04h15, Camille m’informe que l’eau rentre maintenant plus vite qu’elle n’arrive à l’évacuer… Je mets en panne sous cape sèche, pour voir par moi-même ce que l’on peut faire, le bateau semble réagir sainement sous cette allure de sauvegarde.
04h23, le voilier est retourné par une très grosse vague déferlante et reste quille en l’air quelques minutes. Nous sommes prisonnier dans la coque dans le noir total, de l’eau jusqu’au ventre. D’abord résignés et épuisés ; sonnés, puis à nouveau prêt à agir.... Mais le bateau se retourne à nouveau, nous avons juste le temps de libérer le canot de survie et d’y embarquer avant que le Carlos III ne coule.
L’équipage au complet sera sauvé par un minéralier en route vers Gênes trente heures plus tard et après cinq retournements du canot de survie. Nous sommes de retour à Port-Vendres aussitôt que nous pouvons marcher, quatre jours après avoir sombré...
Ne reste plus qu’à renaviguer ! ... Et à "gérer" les cauchemars qui vont me visiter pendant près de deux ans...
Les marins peuvent lire ici un autre article sur ce convoyage... Et ce que j’en ai retiré...
Un petit conseil pour ceux qui ont mal au cœur...
Contre le mal de mer, le remède souverain c’est : chanter !
Ça occupe l’esprit et ça stimule l’oreille (qui est aussi le centre de l’équilibre...).