- À 11 ans...
- En vacances à la campagne chez ma sœur ainée.
Entre 10 et 15 ans... Ce sont les années où l’on comprend un peu mieux le monde comme il va... Pour ma part, à partir de 11 ans, et à l’entrée au lycée, le plaisir de l’apprentissage scolaire perd beaucoup de son charme et je suis bien moins assidu et intéressé à tout ce que l’on me propose... Je trouve le monde autour de moi laid et morose, à l’image de cette banlieue qui m’héberge.
La musique alors se présente un peu comme un refuge... Nul besoin de me rappeler que je dois travailler, faire mes gammes, jouer... Tout ça est inscrit dans mon ordinaire.
J’ai beaucoup de respect pour mon professeur, et le rythme soutenu de l’apprentissage qu’il m’impose me convient bien. Il n’en va pas de même pour les concours où il m’inscrit, et où j’ai toujours l’impression d’être engagé à un niveau supérieur au mien...
L’apprentissage se fait selon deux axes, le répertoire musette d’une part, et des transcriptions d’œuvres classiques de l’autre. Les dernières pièces étudiées sont Perles de cristal, les triolets, la Csardas de Monti, l’ouverture de Cavalerie légère de Von Suppé...
- Mon professeur, M. Biondo
sur la droite - Carte postale trouvée par hasard...
Mais je ne supporte plus le musette... L’image que l’on donne de ce genre musical à la fin des années 60, notamment à la télévision, est affligeant. Le sourire est obligatoire, on joue toujours debout, et pourquoi pas en dansant... le répertoire tourne en rond... Toutes les conditions semblent réunies pour que les adolescents détestent l’accordéon, et c’est tout simplement ce qui arrive ! Et moi je bataille en mon fort intérieur car il est difficile de travailler dur et de ne pouvoir montrer ce que l’on fait aux amis de sa génération...
Mais c’est finalement un triste enchainement qui va m’éloigner provisoirement de l’accordéon... D’abord un grave accident de travail de mon père, qui le laissera partiellement paralysé, suivi rapidement par de graves accidents de santé de ma mère, qui fait 3 infarctus en moins d’un mois. L’heure n’est plus à la musique, il s’agit de survivre puisque maintenant l’argent qui rentre à la maison se limite à la pension de mon père, calculée, comme il se doit, sans tenir compte des heures supplémentaires. Les temps sont durs et finalement à l’âge de 15 ans je trafique mes papiers d’identité pour me vieillir un peu et pouvoir travailler...
Je me fais embaucher comme électricien sur l’immense chantier de Thiais La Belle Epine, et c’est la fin des apprentissages. J’apprends de mon proviseur que j’ai été présent 54 jours dans l’année au lycée et je suis prié d’aller glander ailleurs... Il n’est plus question de payer des cours d’accordéon, et pendant près de 2 ans, je ne vais plus le toucher.
- A bord du "[Petit boulinier->art12]"
- mon deuxième voilier...
Les retrouvailles se feront lors d’un convoyage (je suis devenu marin...), j’emmène le "Zéro de conduite", un rêve d’Antilles, jusqu’à Trinidad, mais maintenant je m’intéresse à un tout autre répertoire : les chansons de marins, les chansons réalistes. En fait, je chante et j’utilise l’accordéon comme un instrument d’accompagnement. Durant ce voyage qui durera une dizaine de mois, l’accordéon sera très utile, pour faire des rencontres, pour m’ouvrir des portes, voire même pour trouver de quoi améliorer l’ordinaire puisqu’après avoir quitté le Zéro de conduite à Trinidad, j’ai continué mon voyage au gré des évènements... avec 40 $ en poche...
Pendant quelques années, je vais faire la manche avec ce répertoire...